Le ciel attendra
Le ciel attendra
Marie-Castille Mention-Schaar
UGC Distribution
Réalisé par Marie-Castille Mention-Schaar, Le ciel attendra est un film français dramatique sorti en octobre 2016.
Sortez mouchoirs et journaux (pour bien suivre l’actualité), car vous en aurez besoin pour ce film ! Rares sont les drames se situant au plus près de l’actualité de notre pays, ou du moins le faisant aussi bien. Il faut comprendre que le 13 novembre parisien et le 14 juillet niçois restent encore et toujours dans la mémoire des français… Autant vous dire qu’il me sera donc très difficile de faire de l’humour pour résumer ce film, aussi touchant et juste soit-il.
Le film présente d’emblée une jeune femme âgée de 17 ans, Sonia (interprétée par l’incroyable Noémie Merlant) ayant caché sa radicalisation à ses proches. Lorsque la police pénètre dans la maison familial c’est le choc : Sonia est arrêtée pour avoir tenter de réaliser un attentat avec l’aide d’un groupe djihadiste. Celle-ci explique alors, vouloir « obtenir » des places au paradis pour elle et sa famille en commentant l’irréparable.
En parallèle, le spectateur découvre Mélanie (Naomi Amarger), lycéenne de 17 ans vivant avec sa mère en banlieue parisienne. Elle est bonne élève, sociable, violoncelliste, et rêve d’un monde meilleur. Alors que son avenir scolaire et professionnel semble tracé, celle-ci rencontre un certain « prince » sur internet. Ce dernier lui confirme que les anges existent, et qu’elle peut aisément en faire partie.
Les deux parcours se ressemblent, mais ne convergent pas vers le même point. Si l’une des deux jeunes femmes réussit à s’en sortir et à comprendre ses erreurs, l’autre sombre progressivement et définitivement dans la folie et l’embrigadement. Une guérison contre une intoxication irrévocable.
Même en étant une admiratrice de la réalisatrice je peux objectivement affirmer qu’après Les héritiers (2014) c’est toujours avec la même justesse et la même tendresse que celle-ci réussit à mettre en lumière la perdition de deux adolescentes noyées par la haine et l’incompréhension. A travers deux histoires différentes, Marie-Castille Mention Schaar présente une certaine étude psychologique et anthropologique de femmes souhaitant partir en Syrie.
L’histoire expose un formidable travail d’enquête d’une mère souhaitant comprendre pourquoi sa fille a subitement décidé de s’enfuir pour l’Etat islamique. Dounia Bouzar, anthropologue et créatrice du Centre de Prévention de Déradicalisation et de Suivi Individuel (CDPSI), joue son propre rôle. Elle permet au spectateur de se situer davantage auprès de ces jeunes (sur la voie de la rédemption ou de l’islamisation radicale) ou encore de ces parents désespères de n’avoir rien vu venir.
Par la reconstitution au plus près de la réalité, la réalisatrice démontre qu’il n’est pas nécessaire que la personne soit fragilisée, isolée, pour qu’elle tombe à ses dépends dans les griffes de rabatteurs de Daech. La plupart se faisant passer pour des défenseurs de la vie humaine ou pour de parfaits maris.
Les acteurs sont bluffants, et jouent parfaitement leur rôle. Sandrine Bonnaire se présente comme une mère désarmée, désemparée, aimante et compréhensive à l’égard de sa fille Sonia. De la même façon, Zinedine Soualem s’engage dans un portrait meurtri et inquiet d’un père ayant perdu tout espoir. Clotilde Courau incarne Sylvie, autrefois enjouée et positive, elle n’est désormais plus qu’une mère partagée entre la colère, le désespoir et l’incompréhension du départ de sa fille. Son visage est marqué par la souffrance, sa coquetterie s’est envolée, et la tristesse se lit dans ses yeux.
Mon regard s’est cependant tourné vers Noémie Merlant, 27 ans, dont le talent se traduit par une aisance bouleversante, sincère, et incroyablement réaliste. Une très grande actrice en devenir.